Black Hole

Publié le par Dorian Gay

L’esprit, au sein des cercles vicieux : parlons en.

Et bien, l’un des exemples les plus illustratifs est l’angoisse, l’anxiété.

 

Votre médecin vous annonce que vous êtes atteint d’une grave pathologie et que vous devez subir plusieurs interventions chirurgicales.

 

Vous vous inquiétez, vos proches, vos amis, vos amours s’inquiètent tout autant.

Mais comme il est évident que l’angoisse affecte votre appétit et votre sommeil, il en résulte que ce n’est pas une émotion saine pour vous.

 

Mais vous ne pouvez vous en empêcher : vous vous inquiétez.

Et vous vous angoissez davantage car l’inquiétude elle même vous angoisse.

 

Et plus encore, ce qui est d’ailleurs absurde et vous vous en voulez d’ailleurs pour cela : vous êtes anxieux parce que vous êtes angoissé par le fait d’être inquiet – c’est cela un cercle vicieux.

 

Maintenant, pouvez vous permettre à votre esprit de s’immerger dans le silence le plus absolu ? N’est ce pas difficile ?

 

Tout simplement parce que l’esprit est comme un singe agité dans une cage, sautillant, mordant et vociférant sans arrêt.

 

Et une fois que vous avez appris à penser, à votre naissance, dès votre premier souffle, lorsque vous vous libérez des entrailles maternelles, vous ne pourrez plus arrêter de penser.

 

Ainsi, un nombre infini de personnes vouent leurs vies à occuper leur esprit et sont extrêmement incommodées par le silence, le vide, le noir, le néant.

 

Quand vous vous retrouvez seul, lorsque personne ne prononce mot, lorsqu’il n’y a rien à faire, lorsque vous êtes hermétiquement protégés de toute distraction, vous sentez l’angoisse frémir sous votre peau n’est ce pas ?

 

Je me retrouve tout seul avec moi même.

Et je veux fuir… de moi même.

Je veux toujours fuir de moi même, m’éviter.

 

C’est la raison pour laquelle je vais au cinéma.

C’est la raison pour laquelle je vais en soirée.

C’est la raison pour laquelle je vais au restaurant et que je vais acheter des pâtisseries tous les dimanches.

C’est pour cela que je lis des livres qui me font voyager.

C’est la raison pour laquelle je discute, sur les réseaux sociaux, avec d’autres gens qui cherchent à se dérober… d’eux mêmes.

C’est la raison pour laquelle je parle aux garçons, c’est la raison pour laquelle j’en rencontre quelques uns, c’est la raison pour laquelle certains posent des baisers sur mon cou.

C’est la raison pour laquelle je m’enivre d’alcool à en oublier le présent.

 

Je ne veux pas être seul avec moi même.

 

Mais pourquoi voulons-nous toujours nous soustraire à nous mêmes ?

Qu’il y’a t’il de si terrifiant, de si lugubre ?

Pourquoi voulons-nous à tout prix oublier ce que cela fait de se retrouver seul avec soi même ?

Nos vrais visages sont ils si disgracieux ?

Pourquoi aspirons-nous tous à devenir qui nous sommes alors même que nous ne supportons pas d’être en notre propre compagnie ?

 

Je sais pourquoi.

Parce que nous sommes captifs, prisonniers de nos pensées.

Tout comme toute autre drogue.

Dangereuse, comme toutes les autres.

Camés, tout autant par ce flux ininterrompu de pensées.

 

Et il s’avère extrêmement difficile d’arrêter de penser.

Et pourtant, il est nécessaire par moments afin de vivre une vie saine, de faire cesser cette mélodie incessante, compulsive.

 

En effet, si je parle sans interruption, je n’entendrai plus ce que quelqu’un d’autre aurait à dire. Et il en résulterait que je n’aurai plus rien à dire à part les choses que j’aurai déjà dites.

 

Ainsi, de la même façon que je ne peux suspendre le flux de mes pensées, je n’aurais rien d’autre à penser que mes pensées elles-mêmes.

 

Par conséquent, afin d’avoir matière à penser, il faut paradoxalement parfois prendre simplement le temps d’arrêter de penser.

 

Et bien, comment procéder ?

La première règle est : n’essayez pas.

Vous seriez comme quelqu’un qui tenterait de calmer des eaux tempétueuses avec un fer à repasser. Le seul résultat logique que vous obtiendrez sera de l’eau bouillante, encore plus pétulante.

 

Ainsi, de la même manière qu’une eau trouble et turbulente se calme lorsque laissée en repos, seule, vous devriez apprendre à laisser votre esprit, tout aussi seul… avec lui même.

 

Il s’apaisera tout seul.

 

Je me suis rarement retrouvé seul, face à moi même, une à deux fois au plus au court de ma vie. J’ai vu enfin mon vrai visage, j’ai caressé mes traits, je me suis étreint, j’ai discuté avec moi même, nous avons pleuré, nous avons ri. Je ne voyais plus rien , n’entendais guère, mes sens étaient obst

rués, même le tic tac incessant du temps s’était arrêté.

 

Deux rares fois.

  • Au milieu de sapins Norvégiens, les pieds dans la mousse, mon maquillage coulant sous la pluie naissante, pas de vent, pas d’oiseaux, rien, le vide le néant. Et je souriais béatement.

 

  • Au long d’un pont New Yorkais, seul, face au silence léger de la nuit, des bruits sourds, une brise à peine perceptible, les yeux rivés dans un million de lumières urbaines, je me tenais la main.

 

J’aimerais tellement que vous puissiez vivre ce ravissement, au moins une fois : le néant, la vacuité la plus absolue.

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